Pourquoi ou comment ?

Pourquoi ou comment ?

Imaginons… vous confiez une tâche à un collègue ou à un membre de votre équipe. Tout est clair. Vous avez pris le temps de préciser le contexte et le point de sortie, le résultat attendu.

Au cours d’un point d’étape, vous vous apercevez que votre collègue/collaborateur fait fausse route, car il n’a pas pris les bonnes données de départ. C’était pourtant évident – pour vous – qu’il ne fallait pas prendre ces données.

Face à cette situation qu’avons-nous tendance à faire ? Quelle est la question que l’on pose souvent ? « Mais pourquoi as-tu pris ces données ?!! Ce ne sont pas les dernières. Pourquoi tu n’as pas vérifié ? ».

Au-delà des mots employés (Pourquoi), ce qui transparaît dans le ton employé est : « pourquoi as-tu fait cela…imbécile ! »
Face à une erreur, un échec, nous posons souvent la question « Pourquoi ? ». Or poser cette question c’est renvoyer au passé, un passé qui ne pourra pas être changé.

Une fois l’erreur constatée, qu’est-ce qui est le plus important pour nous ? Le passé ou le futur ? Savoir pourquoi la personne a fait cette erreur (passé) ou savoir comment elle va s’organiser pour rectifier l’erreur et arriver ainsi au résultat attendu (futur) ?

Notre système éducatif français privilégie la recherche des erreurs, c’est le syndrome du « stylo rouge » ou, en entreprise, de la recherche du coupable.
Nous consacrons parfois plus de temps à comprendre d’où vient l’erreur que de temps à trouver une solution.

Notre croyance est que la connaissance des causes de l’erreur nous renseignera forcement sur la solution à adopter. Ce qui n’est pas toujours le cas.

Si une personne qui ne sait pas nager se retrouve dans une piscine et commence à couler, quel intérêt de lui demander pourquoi elle ne sait pas nager ou pourquoi elle est dans cette piscine ? Le plus important est de s’intéresser à comment nous allons faire pour la sortir de là ! De la même façon, je m’aperçois que le pneu de ma voiture est crevé. Qu’est-ce qui est le plus utile ? Me demander pourquoi ce fichu pneu est crevé ou comment je vais faire pour le remplacer ?

Dans le cas du dossier confié à un collègue ou à un collaborateur que faire ?

  1. Partager notre constat, sans juger ni rabaisser : les données utilisées ne sont pas les bonnes.
  2. Évoquer les conséquences directes et objectives sur la fiabilité du résultat
  3. Rappeler l’objectif en termes de résultat attendu et de délai imparti
  4. Demander à la personne comment elle va s’organiser pour atteindre l’objectif et si elle a besoin de notre aide

Lors de l’étape 4, il est probable que la personne aille d’elle-même dans le passé pour y chercher les raisons de son erreur et qu’elle tente alors de se justifier.

La bonne posture à adopter est d’être constructif et de guider la personne vers la recherche de solutions : « d’accord, tu as vu d’où vient l’erreur. Maintenant, comment vois-tu les choses ? que vas-tu faire ? comment vas-tu t’organiser ? ». Puis, plus tard, lors d’un débriefing « que retiens-tu de ce qui s’est passé ? Que feras-tu de différent la prochaine fois ? ».

Procéder ainsi c’est accepter le droit à l’erreur (non répétitive) et favoriser le « test & learn » source de développement et de responsabilisation.

Un dernier élément qui a son importance. Poser la question « pourquoi tu as fait cela ? », c’est infantiliser la personne, la renvoyer au temps de l’école primaire où elle se faisait réprimander par sa maîtresse ou son maître d’école.
Avec un risque de provoquer chez elle des mécanismes de défense comme la recherche d’excuses, des plaintes, un désengagement voire de l’agressivité. Bref, une perte d’énergie, d’efficacité et de temps pour tout le monde.

En résumé face à une erreur, le futur plutôt que le passé, le « comment » plutôt que le « pourquoi ».

Paul Simoes, manager et coach certifié chez haxio

la crise, c’est (aussi) l’occasion à saisir

la crise, c’est (aussi) l’occasion à saisir

 

Vous avez aimé Paris désert ? Vous l’adorerez de retour aux affaires.

Bon autant l’avouer : ce n’est pas encore ça. Pour cette rentrée, l’avant dernière de l’année (nous en aurons au moins trois en 2020 : janvier, juin, septembre), on en est encore au stade des répétitions. Qu’on ne se mente pas : elles risquent de durer. Il y a des voitures – mais davantage de vélos. Il y a des enfants devant les écoles – mais pas tous les enfants, ni devant toutes les écoles. Il y a des collaborateurs au bureau – mais ce ne sont pas les mêmes qu’hier, ni les mêmes que demain, un roulement secret s’opère dont les règles restent floues, entre celles et ceux qui ont peur des transports en commun, celles et ceux qui ont des enfants à demeure, celles et ceux qui ont basculé avec béatitude dans le 100% télétravail… et rêvent d’y rester… Le métro fonctionne – mais certaines stations, ignorant la fin du confinement, demeurent fermées. Le masque est obligatoire – mais sous terre ou dans certains magasins : dans les rues, les parcs, ils ont disparu. Avez-vous remarqué ? Quand on cherchait des masques, on n’en trouvait pas. Maintenant qu’on en trouve partout, on les cherche aussi partout…

Alors c’est ça le monde d’après ? Une racine carrée du monde d’avant, avec de rares masques, de nombreux vélos et des restaurants dont les terrasses fleurissent sur les trottoirs comme des champignons après l’orage ? On ne le sait pas ou plutôt : on ne le sait pas encore. Le CAC 40 remonte mais moins vite que le nombre de licenciements et de faillites d’entreprises. Les déficits et les dettes, formant montagnes à rembourser, donnent le vertige. Les recrutements sont rares, les entreprises qui recrutent incertaines de l’avenir, du leur, de leur trajectoire et de celle de leur secteur. Quelque chose se passe au niveau de la Société, des sociétés et des individus qui reste à écrire, entre reprise, réforme, réinvention ou révolution. Plus que jamais, on aime se rappeler le mot de John F Kennedy : « écrit en chinois, le mot crise est composé de deux caractères : l’un représente le danger et l’autre l’occasion à saisir ».

 On a (bien) pris la mesure du danger : il reste maintenant à trouver et à saisir les occasions…

 

l’attente, c’est long à la fin

l’attente, c’est long à la fin

 

Un jour, quand on reparlera de cette période qui n’en finit pas de finir, s’allongeant tel le Nil en son Delta, on se rappellera l’attente. Qu’aurons-nous attendu ! Et qu’attendons-nous encore !

Nous attendons tant que nous ne savons plus quoi, ni pourquoi. Les déclarations du PR et du PM ? Les réouvertures des parcs, des jardins, des cafés ? La publication du nombre de licenciements aux Etats-Unis, de créations d’emplois en France ? La reprise de l’économie, celle du foot­ ? Nous attendons – sans doute – le retour de la vie, aussi insatisfaisante fût-elle avant.

L’attente est trouble. Elle est dans le présent ce qui nous sépare de l’avenir. Nous attendons au présent mais c’est un présent empêché, contrarié, que creuse, comme la mérule les charpentes de bois, le manque de ce que nous espérons ou redoutons. L’attente est le manque en nous de l’avenir quel qu’il soit, sombre ou radieux. L’attente fait obstacle, elle est frein, elle est incomplétude.

 « Quand saurai-je ? » nous demande un candidat ou une candidate en final sur un poste. « Dans trois jours » lui répondons-nous. Et ce sont pour elle, pour lui trois jours de vide.

Car ce qui nous sépare du futur nous sépare aussi du présent. C’est un thème proustien, qu’explique merveilleusement dans Le baiser du soir Nicolas Grimaldi, grand philosophe de l’attente et qui livre, dans la dernière parution de Philosophie Magazine, une très beau témoignage.

Le contraire de l’attente, de cette attente qui pèse comme un couvercle sur le monde depuis mars, qui occupe tous les esprits et alimente toutes les peurs, le contraire de l’attente, c’est l’action.

Alors, ressortons ! Retravaillons, reparlons et revoyons du monde autrement que derrière des écrans ! Revivons masqués parfois, à un mètre de distance tout le temps – mais revivons !

être prêt à, c’est mieux quand on est près de

être prêt à, c’est mieux quand on est près de

 

Peut-être faut-il dire les choses simplement : les autres nous manquent.

Entendons-nous : les autres, ce sont des collègues, ami.e.s, parent.e.s, candidat.e.s, client.e.s et aussi toutes sortes de personnes que nous croisions, en allant au bureau, en en revenant, sur les quais du métro, au pied d’un feu rouge, des personnes que nous ne connaissons pas mais que nous finissons par saluer à force de les croiser aux mêmes endroits, aux mêmes heures, qui sont entrées dans nos vies, comme ça, de manière furtive.

Bien sûr, il y a eu les outils de travail… et de famille (le mot marche-t-il aussi ?) à distance. Nous avons tous été heureux de voir les nôtres, des collègues et des candidat.e.s, via un écran, chez eux, avec un vrai ou un faux arrière-plan, parler, bouger, vivre. Au début, le plaisir était si vif, il élargissait les murs de nos salons et nous faisait accroire, l’espace d’une heure ou deux, que tout ceci n’était qu’un mauvais rêve, que nous allions nous réveiller pour les prendre dans nos bras ou leur serrer la main. Avec le temps, le plaisir est resté (oui, oui le plaisir est vraiment resté), mais il s’est atténué, dilué, toujours les mêmes décors, toujours la même immobilité, laissant place à une frustration grandissante – il nous fallait autre chose

Depuis lundi, nous avons eu cette « autre chose »… et ça a été un vrai bonheur. Nous avons revu certaines personnes, collègues ou candidat.e.s, et même ces inconnu.e.s que nous croisions, avant – au bureau, dans la rue, sans attestation sur nos smartphones. Ce n’était pas de la 3D, ce n’était pas un nouveau miracle de la technologie : non, elles et ils étaient là, en chair et en os, nous les voyions pour de vrai, nous pouvions les… et puis non, nous ne pouvions pas les toucher, nous nous tenions un peu gauchement en face d’elles et d’eux, opérant des chorégraphies de distanciation maladroites – et même l’expérience de les voir s’est révélée comparable aux giboulées de mars, un coup soleil (sans masque), un autre pluie (avec…)… bref, il nous faudra encore autre chose…

Durant la période de confinement, nous avons lu, nous avons ralenti, nous avons réfléchi : en savons-nous plus sur nous-mêmes ? Il est permis d’en douter. Nous sommes le produit d’un arbitraire originel (le hasard des rencontres et des amours de nos aïeux) qui à la fois nous définit et nous échappe. Nous ne sommes ni stables, ni asssuré.e.s – variables tout au contraire, en chantier permanent, Dans notre construction, nous ne sommes rien sans les autres. Notre moi se bâtit, se développe, se renforce, s’épanouit au contact et à l’épreuve de l’autre. C’est vrai à l’intérieur de la famille, c’est vrai à l’école, c’est vrai avec nos ami.e.s, c’est vrai au travail. C’est pourquoi, les autres nous manquent – et que nous serons toujours prêts à faire plus de choses quand nous serons (un peu plus) près d’elles et eux…