L’affaire Griveaux donc. Ce qu’elle nous raconte. Les conclusions que nous en tirons. Pas en apprentis sociologues, encore moins aspirants politologues. Tout a été dit de ce côté-là, de l’ignominie, de la confusion détestable des vies privée et publique, de la dictature horizontale des réseaux sociaux, des guerres, soudain relancées, de quelques-uns contre quelques autres – et au nom de quoi ?, on l’ignore, de la haine de soi et de son prochain, le pseudo puissant, qui ne laisse pas d’interroger, en France, en 2020. Non, ce que l’affaire raconte à nous, chasseurs.

Côté pile, les CV devenus impersonnels à force de ne plus vouloir rien indiquer, ni adresse, ni âge, ni genre, ni hobby. Nous en avons déjà parlé ici. Blanc sur blanc. Effacements. Disparitions. Et c’est très bien ainsi.

Côté face, la vie des candidats sur la toile. Qui sourde. Qui déborde. Qui s’échappe. Traces laissées. Cailloux du Petit Poucet. Empreintes dans la neige de Danny Torrance dans Shining. Quelque chose dysfonctionne. Privé ou public ? Personnel ou professionnel ? Candidat-e anonyme ou exhibitionniste ? Tout se mêle et s’emmêle. Nous sommes rivés à nos Smartphones. Aux réseaux. Insta. FB. Twitter. Snap. LinkedIn. Nous mitraillons la terre avec nos appareils photos. Près de 1.500 milliards photos (numériques) par an – contre 85 milliards (argentiques) en 2000. Inflations. Partout des images dispersées qui servent à tout. Qui remplacent l’écrit. Qui font à la fois fond et forme, rapport et faits, preuves et vérité. Selfies. Stories. Narcissismes. Affichages de soi, de sa vie, de ses relations, de ses voyages… de sa sexualité…

Alors ?…

Alors, les mots de Bossuet qui reviennent : « Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes » et Baudelaire, forcément Baudelaire :

Je suis la plaie et le couteau !

Je suis le soufflet et la joue !

Je suis les membres et la roue,

Et la victime et le bourreau ! »