l’attente, c’est long à la fin

l’attente, c’est long à la fin

 

Un jour, quand on reparlera de cette période qui n’en finit pas de finir, s’allongeant tel le Nil en son Delta, on se rappellera l’attente. Qu’aurons-nous attendu ! Et qu’attendons-nous encore !

Nous attendons tant que nous ne savons plus quoi, ni pourquoi. Les déclarations du PR et du PM ? Les réouvertures des parcs, des jardins, des cafés ? La publication du nombre de licenciements aux Etats-Unis, de créations d’emplois en France ? La reprise de l’économie, celle du foot­ ? Nous attendons – sans doute – le retour de la vie, aussi insatisfaisante fût-elle avant.

L’attente est trouble. Elle est dans le présent ce qui nous sépare de l’avenir. Nous attendons au présent mais c’est un présent empêché, contrarié, que creuse, comme la mérule les charpentes de bois, le manque de ce que nous espérons ou redoutons. L’attente est le manque en nous de l’avenir quel qu’il soit, sombre ou radieux. L’attente fait obstacle, elle est frein, elle est incomplétude.

 « Quand saurai-je ? » nous demande un candidat ou une candidate en final sur un poste. « Dans trois jours » lui répondons-nous. Et ce sont pour elle, pour lui trois jours de vide.

Car ce qui nous sépare du futur nous sépare aussi du présent. C’est un thème proustien, qu’explique merveilleusement dans Le baiser du soir Nicolas Grimaldi, grand philosophe de l’attente et qui livre, dans la dernière parution de Philosophie Magazine, une très beau témoignage.

Le contraire de l’attente, de cette attente qui pèse comme un couvercle sur le monde depuis mars, qui occupe tous les esprits et alimente toutes les peurs, le contraire de l’attente, c’est l’action.

Alors, ressortons ! Retravaillons, reparlons et revoyons du monde autrement que derrière des écrans ! Revivons masqués parfois, à un mètre de distance tout le temps – mais revivons !

être prêt à, c’est mieux quand on est près de

être prêt à, c’est mieux quand on est près de

 

Peut-être faut-il dire les choses simplement : les autres nous manquent.

Entendons-nous : les autres, ce sont des collègues, ami.e.s, parent.e.s, candidat.e.s, client.e.s et aussi toutes sortes de personnes que nous croisions, en allant au bureau, en en revenant, sur les quais du métro, au pied d’un feu rouge, des personnes que nous ne connaissons pas mais que nous finissons par saluer à force de les croiser aux mêmes endroits, aux mêmes heures, qui sont entrées dans nos vies, comme ça, de manière furtive.

Bien sûr, il y a eu les outils de travail… et de famille (le mot marche-t-il aussi ?) à distance. Nous avons tous été heureux de voir les nôtres, des collègues et des candidat.e.s, via un écran, chez eux, avec un vrai ou un faux arrière-plan, parler, bouger, vivre. Au début, le plaisir était si vif, il élargissait les murs de nos salons et nous faisait accroire, l’espace d’une heure ou deux, que tout ceci n’était qu’un mauvais rêve, que nous allions nous réveiller pour les prendre dans nos bras ou leur serrer la main. Avec le temps, le plaisir est resté (oui, oui le plaisir est vraiment resté), mais il s’est atténué, dilué, toujours les mêmes décors, toujours la même immobilité, laissant place à une frustration grandissante – il nous fallait autre chose

Depuis lundi, nous avons eu cette « autre chose »… et ça a été un vrai bonheur. Nous avons revu certaines personnes, collègues ou candidat.e.s, et même ces inconnu.e.s que nous croisions, avant – au bureau, dans la rue, sans attestation sur nos smartphones. Ce n’était pas de la 3D, ce n’était pas un nouveau miracle de la technologie : non, elles et ils étaient là, en chair et en os, nous les voyions pour de vrai, nous pouvions les… et puis non, nous ne pouvions pas les toucher, nous nous tenions un peu gauchement en face d’elles et d’eux, opérant des chorégraphies de distanciation maladroites – et même l’expérience de les voir s’est révélée comparable aux giboulées de mars, un coup soleil (sans masque), un autre pluie (avec…)… bref, il nous faudra encore autre chose…

Durant la période de confinement, nous avons lu, nous avons ralenti, nous avons réfléchi : en savons-nous plus sur nous-mêmes ? Il est permis d’en douter. Nous sommes le produit d’un arbitraire originel (le hasard des rencontres et des amours de nos aïeux) qui à la fois nous définit et nous échappe. Nous ne sommes ni stables, ni asssuré.e.s – variables tout au contraire, en chantier permanent, Dans notre construction, nous ne sommes rien sans les autres. Notre moi se bâtit, se développe, se renforce, s’épanouit au contact et à l’épreuve de l’autre. C’est vrai à l’intérieur de la famille, c’est vrai à l’école, c’est vrai avec nos ami.e.s, c’est vrai au travail. C’est pourquoi, les autres nous manquent – et que nous serons toujours prêts à faire plus de choses quand nous serons (un peu plus) près d’elles et eux…

la crise, c’est mieux après

la crise, c’est mieux après

 

C’est dans Garçon de quoi écrire, je crois. Jean d’Ormesson répond aux questions de François Sureau.

A une question « Aimez-vous la fête ? » Jean d’O avoue que « Non » et de poursuivre « j’aime la fête avant la fête, j’aime la fête après la fête, et Venise sans carnaval. »

Il est permis de remplacer le mot fête par le mot crise, et de songer que nous aimerons (peut-être) la crise après qu’elle sera passée. Quand nous danserons pieds nus sur ses cendres refroidies. Quand nous revivrons. Quand tout sera reparti.

Ce n’est pas demain la veille ? Non. De l’avenir, nul ne sait rien. L’avenir, c’est le 11 mai, c’est cet été, c’est demain : c’est en France, c’est en Europe, c’est dans le monde – et nous ne savons rien.

Beaucoup affirment beaucoup de choses, souvent de manière péremptoire : personne ne sait vraiment, ou alors rétrospectivement, et encore, même pas.

Ce que nous savons ? Que l’emploi souffre, qu’il souffrira demain et après-demain. Que l’avenir est difficile, mais il l’a toujours été, depuis Alexandre et Constantin jusqu’à hier, au 20ème siècle, qui fut si atroce.

Mesurons notre chance, celle de vivre en France, ce vieux pays dont nous nous plaignons tant, sans doute parce qu’il est très généreux avec nous.

Combattons la paresse intellectuelle, le défaitisme et la critiques faciles, l’indignation moutonnière.

Cultivons l’humilité, la pensée critique constructive, l’action solidaire – et l’espérance… à ce prix, c’est certain, ce sera beaucoup mieux après.

 

abcd’R | spécial [dé]confinement

abcd’R | spécial confinement

 

En cette période suspendue, où chacun retient son souffle, plus que jamais incertain des lendemains, nous avons choisi de déposer quelques notes d’humour sur nos jours de confinement.

Sous forme d’abécédaire, délimitant pour chaque mot un avant et un après, vous trouverez ci-dessous notre premier journal de bord estampillé Covid-19.

 

abcd’R – le confinement

 

Il se veut optimiste car comme le rappelle un proverbe anglais « après cette vie et la suivante, tous nos embêtements seront finis »

Bonne lecture,

haxio